Est-ce difficile de manger différemment en France ? Quel est notre rapport au sans gluten ? Comment ça se passe à l’étranger ? Virginie Wolff, doctorante en sciences sociales, nous aide à y voir plus clair !
Est-ce difficile de manger différemment et donc sans gluten ?
Virginie Wolff : Manger sans gluten chez soi, ne semble plus si compliqué.
Il est aujourd’hui plus facile de trouver et d’imaginer des recettes à base de produits naturellement sans gluten. D’ailleurs, les mangeurs sans gluten sont particulièrement créatifs et inventifs pour remplacer les aliments contenant du gluten !
Depuis quelques années, les magasins biologiques, les épiceries de quartier ou encore les supermarchés proposent une gamme plus importante de produits sans gluten. Mais les grandes villes sont avantagées par rapport aux zones rurales où il peut être difficile de manger différemment.
Ensuite, manger différemment à l’extérieur peut s’avérer nettement plus compliqué ! Il faut parfois prendre des risques avec les contaminations croisées sans que cela ne tourne à l’obsession et à l’angoisse.
Enfin, aller manger sans gluten chez des amis… ça dépend ! Entre ceux qui oublient, ceux qui ne comprennent pas et ceux qui ne veulent pas entendre… Cela peut être difficile, mais les personnes que j’interroge pour ma thèse me disent toutes qu’on tend vers plus d’ouverture. Il faut donc continuer à sensibiliser ses proches et leur montrer qu’il existe mille et un repas naturellement sans gluten !
(NDLR : les observations de Virginie corroborent les résultats de notre baromètre sur les sans gluten, qui dévoile que 73% des sans gluten estiment qu’ils ne peuvent pas aller au restaurant autant qu’ils le voudraient.)
Quel est le rapport des Français au sans gluten ?
Virginie Wolff : En France, la question de la sensibilité au gluten a émergé tardivement dans la sphère publique contrairement à d’autres pays. Peu d’experts et de chercheurs français se sont penchés sur le sujet dessus, notamment parce qu’il existe peu de financements.
Or, pour obtenir des financements, il faut prouver que de nombreuses personnes sont concernées. Par exemple, s’il y avait plus d’adhérents à l’AFDIAG ou une association de sensibles non-coeliaques, il y aurait peut-être plus de subventions, etc… et donc plus de moyens pour agir.
(NDLR : depuis l’interview réalisée en juillet 2017, nous avons publié les tous premiers chiffres permettant de savoir combien de personnes mangent sans gluten en France. Par ici pour découvrir les résultats de notre 1er baromètre en 2019. )
Le modèle médical en France fonctionne sur la base de la preuve scientifique. Les patients sont moins écoutés et leur vécu n’est souvent pas pris en compte. Comme la plupart du temps, tout repose sur les diagnostics (prise de sang, biopsie, etc…), que dans le cas de la sensibilité au gluten, il n’existe pas de tel diagnostic légitimé et reconnu par l’ensemble des médecins, on reste dans la controverse.
Enfin, dans l’imaginaire des personnes, les aliments à base de blé, comme le pain n’apparaissent pas comme un aliment « dangereux » pour la santé, mais plutôt comme des aliments de base, naturel, sains etc… C’est donc compliqué de manger différemment en France et demande parfois un effort de justifications et d’argumentations.
Est-ce que le sans gluten est intégré chez les restaurateurs ?
Virginie Wolff : Les cuisiniers ne sont très rarement sensibilisés à cette question.
Il serait pourtant très simple de proposer des plats naturellement sans gluten et d’éliminer tout risque de contaminations croisées. Il devient nécessaire de former et de sensibiliser les apprentis restaurateurs.
Il existe quelques initiatives et formations dans certaines écoles d’hôtelières, mais elles restent rares. Et donc, les restaurateurs ne prennent pas toujours les demandes des sensibles au gluten au sérieux !
(NDLR : par ici pour mieux comprendre la règlementation en place grâce à l’enquête sur le sans gluten de la DGCCRF)
Dans la restauration collective, comme par exemple à la cafétéria, à la cantine scolaire, au restaurant universitaire, c’est quasiment impossible de trouver du 100% sans gluten. L’AFDIAG s’est lancée le pari de sensibiliser ces acteurs. Il y a encore beaucoup de travail à faire !
Qu’en est-il dans les pays étrangers ?
Virginie Wolff : En Italie, en Espagne et en Allemagne, il y a plus de produits sans gluten dans les supermarchés et dans les restaurants.
Mais surtout, les médecins sont plus informés, plus à l’écoute et les associations ont plus de poids sur les pouvoirs publics, etc… Mais ça n’empêche pas ceux qui mangent «différemment » d’être confrontés aux difficultés du quotidien, comme lors du déjeuner par exemple !
Avez-vous des conseils pour ceux qui mangent différemment ou sans gluten ?
Virginie Wolff : Si j’avais un conseil, ce serait de ne pas s’enfermer dans des conflits avec des personnes qui ne comprennent pas vos choix alimentaires ou vos symptômes.
Il est parfois difficile de faire preuve d’assez d’empathie et de se mettre à la place de l’autre.
Nous avons été socialisés de façon à avoir besoin de preuves pour croire, mais il faudrait sortir de cette façon de voir les choses.
Faisons avancer la thèse de Virginie !
Virginie réalise actuellement une thèse sur les intolérances alimentaires et des régimes d’évictions. Elle cherche des gluten free qui souhaiteraient témoigner.
Son objectif est d’entendre et de faire entendre leur voix, leurs expériences de vie, aussi bien dans la sphère médicale que dans la vie de tous les jours. Si vous voulez la contacter, n’hésitez pas à nous faire signe en commentaire !
Update : Virginie a depuis fini de rédiger sa thèse et l’a même soutenue.
Cet article a été publié le 11 juillet 2017 et a depuis été mis à jour par l’équipe.
La photo de couverture est signée : ©Jakob Owens
COMMENTS (23)
Graux
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Je peux témoigner pour la thèse de Virginie Intolérante au gluten; gluten free que depuis 6 ans. J’ai rencontrés de nombreuses difficultés et eu des differents avec mon entourage et mon médecin…. malheureusement il n’y a pas de tests scintifiques qui puisse attester que je suis intolerante.
Cécile Gleize
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Merci beaucoup Marine 😀
On transmet votre message et adresse mail à Virginie pour qu’elle vous contacte !
L’équipe de Because Gus
Meryl
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Bonjour. Je peux participer à la thèse de Virginie.
Je mange sans gluten depuis 5 ans mais aussi sans lactose, et effectivement c’est parfois difficile de faire comprendre cela à l’entourage même proche.
Cécile Gleize
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Merci beaucoup Meryl 🙂 On transmet votre adresse à Virginie !!
L’équipe de Because Gus
Fanny
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Aidons Virginie ! Oh ouiii !
Cécile Gleize
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Yeeeaaaah on savait que tu serais partante 😉
Merci Fanny !!
L’équipe de Because Gus
Eve
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Bonjour je peux également témoigner, avec plaisir. Il faut faire avancer les mentalités à ce sujet c’est important ! J’ai une colopathie fonctionnelle ( syndrome de l’instestin irritable) diagnostiqué depuis 4 ans et donc en autre avec une alimentation sans gluten.
Cécile Gleize
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Merci beaucoup Eve !! On transmet à Virginie 😉
L’équipe de Because Gus
Noelle EYSSERIC
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Bonjour, je ne sais pas si votre thèse est terminée.
Je suis coeliaque depuis 53 ans avec arrêt de mon régime stoppé de l adolescence à mes 30 ans.
Cordialement
Cécile Gleize
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Merci beaucoup Noelle, on va voir avec Virginie !
L’équipe de Because Gus
Célia
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Bonjour je suis intolérante au gluten et lactose et mange sans depuis 4 ans si je peux aider Virginie c’est avec plaisir !
Cécile Gleize
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Merci beaucoup Célia, on transmet 😀
L’équipe de Because Gus
Pingback: Quand L’Express culpabilise les mangeurs sans | Because Gus
Anne-Sophie Vasco
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Je découvre seulement votre article et si Virginie recherche encore des témoignages je serais très heureuse de pouvoir contribuer!
Cécile Gleize
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Merci beaucoup Anne-Sophie, on lui transmettra !
L’équipe de Because Gus
Nadine
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Bonjour, je découvre votre article. Si Virginie travaille toujours sur sa thèse, je suis disponible pour témoigner, en tant que coeliaque (découvert il y a deux ans).
Cécile Gleize
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Merci pour votre proposition Nadine ! On lui transmettra 🙂
L’équipe de Because Gus
Villain
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Bonjour.
Cœliaque en maladie héréditaire, voyageant régulièrement je veux bien témoigner.
Et ce d autant que j accepte sans difficulté cette maladie .
Cécile Gleize
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Merci pour votre message !
Vous pouvez témoigner sous notre post Facebook, c’est là qu’on a lancé le débat ! Voici le lien du post : https://www.facebook.com/becausegus/posts/pfbid0Dumj3G8pxn5aGxL3t4W3Ti3KUrhqayEj4N1QgmjJNMvhAiDBcmsYo2paH6LqTYMXl
L’équipe de Because Gus,
Marie B
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Bonjour, je suis cœliaque et je veux bien temoigner pour permettre des avancées sur le sans gluten.
Cécile Gleize
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Merci beaucoup Marie ! On proposait un débat sur Facebook car Virginie a de son côté terminé sa thèse.
Si vous voulez témoigner sous le post n’hésitez pas : https://www.facebook.com/becausegus/posts/pfbid02Hb4RvnnuzcxNkD1Yj6ymZ4mNZsstG3x3TiNLihKWcJBr2SaMXj74qYXHebcDzLLql
L’équipe de Because Gus
Nadine
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Bonjour,
L’article initial datant de 2017, la thèse de Virginie est-elle toujours en cours? Il me semble avoir vu sur internet que la soutenance de thèse était déjà passée.
Merci
Cécile Gleize
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Bonjour Nadine,
En effet Virginie a terminé et soutenu sa thèse. On vient d’ajouter un update pour le signaler 😉
Merci à vous !
L’équipe de Because Gus